Le chemin de Régordane

 

1. Le chemin de Régordane

Entre Luc et Alès, le Chemin français prend le nom de Chemin de Régordane. Il traverse, en effet, la provincia de Regordana, évoquée, en 1323, dans un acte du château de Portes, qui s'étend entre Alès, en Cévennes, Chamborigaud, Pradelles et Largentière. Régordane, dérivé de gord, gourd, racine d'un usage fréquent dans le pays, désigne à merveille, les vallées profondes que traverse ce chemin.

Le tracé naturel du Chemin de Régordane correspond à la faille ouverte, à basse altitude, dans la longue barrière formée par le Mont Lozère et le chaînon du Mas de l'Aire, au sud de Villefort. Les nombreuses sources qui la ponctuent sont précieuses pour les voyageurs.

Les romains empruntaient sans doute cette voie naturelle pour le transport des métaux. Mais, c'est, après le partage de l'empire carolingien, qu'elle devint l'axe oriental majeur, reliant l'Ile de France au port de Saint Gilles. La route est tracée sur les hauts-plateaux du Thort, de la Molette et de La Garde-Guérin, taillée dans le schiste sur les pentes de la vallée la Cèze.

2. Le charroi

Le charroi se développe grâce à l'amélioration de l'attelage (un mètre quarante à la voie). La chanson de geste que compose Guillaume d'Orange au milieu du XIIème siècle, le Charroi de Nîmes, est l'écho enchanteur de l'animation qui règne alors sur le Chemin de Régordane : "chars et charrettes i a à grant planté",v.950.

La Guerre de Cent Ans éteint toute activité commerciale sur le Chemin de Régordane et ce n'est qu'à la fin du XVIIème siècle que le Roi Louis XIV, attentif aux troubles religieux dans les Cévennes, considère l'importance stratégique du Chemin de Régordane. On entreprend alors de lourds travaux de reconstruction. Son entretien exigera d'ailleurs de modifier son tracé entre Villefort et La Garde-Guérin : au XVIIIème siècle, on abandonne la côte de Bayard.

L'emploi des diligences impose de nouvelles modifications ; on aménage des virages qui ralentissent aujourd'hui excessivement les voitures : on compte six cent cinquante virages d'Alès à Pradelles.

Le chemin de fer longe en partie le Chemin de Régordane et permet d'admirer des points inaccessibles à pied. Mais le seul moyen de retrouver l'âme du Chemin de Régordane est d'imaginer la marche éprouvante mais joyeuse des pèlerins de Saint Gilles, hélant les paysans pour s'approvisionner, échangeant des informations avec les chevaliers partant ou revenant de la croisade, et d'écouter leurs chants évanouis dans le silence du vent.


<< Retour